Évangile selon Thomas : commentaire du logion 4

Logion 4 :

1 Jésus a dit :
2 L’homme vieux dans ses jours n’hésitera pas
3 à interroger un tout petit enfant de sept jours
4 au sujet du lieu de la Vie,
5 et il vivra,
6 parce que beaucoup de premiers se feront derniers,
7 et ils seront Un.

Commentaire :

Louange à Dieu, Seigneur des mondes !

Il est le Créateur de toute chose, loué soit-Il, et « Quand Il veut une chose, il n'est pour Lui que de dire : “Sois !”, et la chose est » (sourate 36 verset 82). Ainsi, l’Envoyé de Dieu, paix et prières soient sur lui, a décrit en ces termes la manière dont le Très-Haut enveloppe de sa grâce la création de l’embryon, puis du fœtus, dans le ventre de la mère de l’enfant : « La conception de chacun de vous, dans le ventre de sa mère s’accomplit en quarante jours. D’abord sous la forme d’une semence, puis sous celle du plasma sanguin pour une même période, puis sous celle d’un morceau de chair, pour une période semblable. Enfin, un ange lui est envoyé, il y insuffle l'esprit (ar rûh), et reçoit l’ordre d’inscrire quatre décisions [le concernant], à savoir : ce qui lui est imparti comme bien et nourriture, délai de vie, actes et condition heureuse ou malheureuse. Par Dieu, en dehors duquel il n’y est pas de divinité, l’un de vous accomplit des actes comme en font les gens du Paradis au point qu’il ne reste plus entre lui et le Paradis qu’une coudée ; c’est alors qu’il est devancé par le destin inscrit, et amené à commettre des actes, dignes des gens de l’enfer. Et certes, chacun de vous aurait beau œuvrer comme les damnés, au point de s'approcher de l'enfer à la distance d'une coudée, alors ce qui a été écrit pour lui prévaudrait, en sorte qu'il accomplirait les actions des élus et qu'il entrerait au Paradis » (rapporté par Bokhari et Moslim).

Et le Livre Sacré de Dieu précise : « Ils t'interrogent au sujet de l’esprit (ar-rûh). Dis-leur : «L'esprit (ar-rûh) relève de l'ordre exclusif de mon Seigneur et, en fait de science, vous n'avez reçu que bien peu de chose. » (sourate 17 verset 85). Ainsi, l’esprit (ar-rûh) est constamment orienté vers la Vérité, porté par l’Ordre de Dieu. Il est une garantie pour la fidèle de son aptitude dominante à investir la dimension terrestre de son existence par la modalité du dépôt adamite.

Cependant, « Chaque enfant naît avec une nature originelle (al-fitra) pure et saine qui peut-être, par la suite, déformée par l‘influence de l‘environnement ou de l‘éducation » (rapporté par Bokhari et Moslim). La prédisposition naturelle à vivre la Sagesse est donc très rapidement mise à l’épreuve dès lors que l’individu est confronté à son environnement, à sa dimension matérielle et charnelle, et à son quotidien. La vérité de l’esprit (ar-rûh) est alors voilée par celle de l’âme (an-nafs), et cette dernière, par sa simple existence dans le cœur du fidèle, le détourne de la Sagesse et le met en danger, « [...] car l'âme (an-nafs) incite fortement au mal […] » (sourate 12 verset 53).

Quant à ceux qui empruntent la voie de la Vérité et luttent contre les mauvaises tendances qui tentent de s’enraciner en eux, ils sont ceux à propos desquels Dieu dit : « […] J’en jure par l'âme toujours prompte à se faire des reproches ! »(sourate 75 verset 2). Ils luttent contre eux-mêmes et cheminent dans la voie des Sages afin de revenir à la nature originelle de ce que Dieu a mis en eux, comme dans le verset : « Que ne parcourent-ils la Terre pour acquérir des cœurs aptes à comprendre et des oreilles aptes à entendre? En vérité, ce ne sont pas les yeux qui se trouvent atteints de cécité, mais ce sont les cœurs qui battent dans les poitrines qui s'aveuglent. » (sourate 22 verset 46). En effet, le cœur est le miroir par lequel la Vérité illumine de son reflet la conscience de l’itinérant.

C’est ainsi que ceux qui parcourent les sentiers de la Sagesse, avec patience, endurance, et animés d’une Foi indéfectible en la Miséricorde de Dieu, finissent par trouver la Grâce du Très-Haut qui illumine leur cœur, et Dieu leur dit : « Quant à toi, ô âme(an-nafs), désormais apaisée ! Retourne auprès de ton Seigneur, satisfaite et agréée ! » (sourate 89 versets 27-28). C’est ainsi que l’âme (an-nafs) est envahie de l’Ordre de Dieu, et rejoint ainsi la condition de l’esprit (ar-ruh).

« L’homme vieux dans ses jours » est l’itinérant qui a la maturité de la Sagesse et l’expérience de la voie spirituelle. Il « n’hésitera pas à interroger un tout petit enfant de sept jours au sujet du lieu de la Vie » en ce sens qu’il ne cessera d’interroger sa conscience et sa sincérité pour revenir à la nature primordiale adamite, que Dieu, loué soit-Il, a insufflé en lui alors qu’il n’était qu’un embryon dans le ventre de sa mère. Ainsi, « il vivra » et sera apte à assumer le dépôt adamite et la Vérité de la Foi, comme au moment de sa naissance. Ceci, « parce que beaucoup de premiers se feront derniers », et le fidèle retrouvera la lucidité plénière et originelle de ses sens intérieurs, et « et ils seront Un », par la disparition de l’âme (an-nafs) dans l’esprit (ar-rûh).

Ce logion veut donc dire : lorsque l’âme (an-nafs) et l’esprit (ar-rûh) se confondent l’un dans l’autre, la Vérité résonne dans le cœur du fidèle.

« […] Seigneur ! Assiste-nous par un effet de Ta grâce et fais que notre conduite soit conforme à la rectitude ! » (sourate 18 verset 10).

 

Que tu sois loué et glorifié !

 

 

2 Commentaire(s)

  • Anonyme
    Répondre 

    Anonyme

    Vendredi 27 janvier 2017 à 23h08

    As Salam aleykum
    Qu'Allah bénisse vos travaux .
    J'aimerais avoir une explication entre ce qui distingue arruh et an nafs.
    Baraka Lah fikoum

    • Rémy Savin
      Répondre 

      Rémy Savin

      Samedi 18 février 2017 à 12h47

      Salam.
      C'est un sujet tout entier, et répondre en une ou deux phrases serait un raccourci trompeur. Nous allons in sha Allâh traiter ce sujet plus en profondeur.

      Mais, pour ne pas vous laisser sans réponse :

      Disons simplement que le Ruh est continuellement orienté vers la Vérité, et que le Nafs, la conséquence du Ruh dans la responsabilité temporelle, subit les interférences de la condition charnelle, de l'époque, et du degré d'implication dans la responsabilité adamite.

      Il y a d'ailleurs quelques divergences à ce sujet entre différents auteurs du soufisme, divergences d'apparence en réalité. Nous tâcherons de développer tout cela prochainement in shâ Allâh.

Poster un commentaire